dimanche 6 février 2011

Ce rouge

Certains me disent qu'il est difficile de retrouver ce poème dans les anciens messages, je le remets donc ici (il vient de paraître dans Cairn)

                   Ce rouge


de cueillir les cerises
de les emporter ?

Ce rouge
est un royaume

uni et silencieux
Ce rouge de fleur perdue
qui vibrait là
blanche

Fleur accomplie et fleur offerte
fleur disparue  à peine ouverte
elle est finie
Pépie 

Tous ces cuivres qui  brillent
avant le concert !
Ces colibris qui s’éparpillent
dans une clairière 
tous ces lampions
allumés pour ma fête 
ces  pompons, ces confettis
envolés sur ma tête !

Ce rouge
traverse les feuillages
plonge dans mon verre et m’éclabousse
Ce rouge
se multiplie
balles de jongleur, de troubadours
un rouge de petits tambours
battant la mesure

qu’on veut saisir
et qui s’anéantit dès qu’on le touche
coulant, s’écrasant et fondant
laissant  les mains et  la bouche
cramoisis

qui luit
rayonne doucement
même sous la pluie

Ce rouge à minuit
qui veille
tapi dans les feuilles noires

Ce rouge
assorti à tes oreilles
Ce rouge
qui rebondit longtemps
dans mon sommeil

Ce rouge nouveau
Ce velours, ce violon, ce miel rouge
Un peu plus lourd que le miel blond

Ce jour suffit
si l’on se repose
dans le rouge

Pourquoi se presser ?

Ce rouge balancé
Ce rouge touché par le soleil

pour les moineaux
Ce rouge volé
par les pies

pour les fourmis
Et si petit
pour les hirondelles

entre les feuilles
Ce rouge qui rend jaloux
les écureuils

Ce rouge brûlant
Ce rouge
que veulent éteindre
les impatiences

qu’il attise
Des brindilles s’allument dans l’air
et s’électrisent
Étincelles rousses
Ivresse
Chaleur de brousse

quand les cerises
sont toutes éprises

Rouge à crédit
Richesse du rouge
Paresse qui bouge
L’été