"Il y a quelqu'un ? "
Il paraitra peut-être un jour...
Grain de sable
Les jours gris se répètent en long tunnel. Derrière un mur,
des enfants jouent dans la cour de
l’école. Leurs cris éclaboussent, comme au bord de la mer. Des
voix, des appels, des courses, toute une
rumeur. L’été.
Un grain de sable interrompt le défilement temps. Se révèle une saison secrète, un espace tout
proche, une trouée de soleil.
Un instant, je me retrouve sur la plage, dans une vague. Les
enfants nagent au-dessus de l’eau.
Moitié humain ?
Lui aussi est venu pendant des années, mais aujourd’hui,
c’est un adolescent et personne ne sait qu’il disait n’importe quoi. .
Il voulait devenir le roi des vies. Lui n’en avait pas.
Il confondait hier et demain et la plupart des choses. Il
disait qu ‘il était une boulangerie. Ensuite, il est devenu à moitié
fantôme, à moitié humain , ce qui était un progrès. À l’école, il y avait
des pièges. Les lettres au tableau se déguisaient. Il entendait juste quelques
voix et se tapait la tête quand il croyait avoir une mouche dans ses cheveux. Il ne comprenait
pas, on le croyait bête, mais c’est
qu’il se méfiait des mots. Il craignait d’être
pris dans un filet de filles. Quand on venait le chercher, il se
cachait, un jour, non, il est resté, il
avait trouvé une autre idée : faire
semblant d’être un autre enfant. Semblant, c’était nouveau, un petit espace de
jeu. Il était étonné d’aller mieux.
Parler c’était bien, même s’il disait encore le mot contraire. Il a commencé à
faire des rébus d’impasse. D’abord, c’était le vide, après, c’était les
solutions. Il y avait moins de présences espionnes. Il apprenait consciencieusement et sans faiblir toutes les
règles du jeu, les usages, les codes sociaux et les signes mathématiques. Tout
ému d’avoir réussi à être accueilli dans
une petite bande. Avant, dit-il, j’avais
fermé la porte à clé. Maintenant, des fois
je l’ouvre.
Un à un
Il ne sait pas pourquoi tout s’est cassé dans sa vie.
Jusque là, ça allait. Un ado comme un autre. Il s’adaptait, suivait les
autres. Et maintenant, il a tout le temps peur.
Il ne peut plus faire face. Son visage a changé.
Il a mis longtemps avant d’accepter de me rencontrer,
mais il ne pouvait plus faire autrement, à moins de renoncer à l’existence.
Il parle lentement. Il cherche les phrases justes. Un
à un, les mots viennent relever l’être tombé sans bruit.
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