lundi 21 décembre 2015

Il n'est plus d'étrangers

La chronique de Jacqueline Persini pour la revue Poésie présente.
Merci Jacqueline

Catherine Leblanc, il n’est plus d’étrangers, L’AMOURIER, 12E

« Il n’est plus d’étrangers » : le titre cache-t-il un vœu pieux, un rêve, une utopie dans cet univers où étranger s’associe, pour beaucoup,  à la menace, au danger? Utopie que l’auteur préserve dans sa « maison de mots, ouverte, accueillante des ombres et  lumières de chacun, passant ou proche, de l’enfant « savant sans le savoir » au mourant qui consent à rendre les armes mais ne veut pas manquer la dernière floraison du cerisier. Avec délicatesse, sensibilité, l’auteur capte la singularité d’une personne, la fulgurance d’un moment.
 La psychologue écoute aussi ceux qu’on appelle fou, respecte leur silence « qui n’est pas une impossibilité à parler ». « J’apprivoise des méfiants, des sauvages. Ils me reposent de ma propre sauvagerie. Je croise des êtres qui m’ignorent et ça ne me dérange pas, car l’instant où je les rencontre rattrape tous les autres ».
La rencontre suppose de retrouver ou de faire surgir cette part d’humanité qui nous est commune tout en reconnaissant cet étrange étranger qui se cache  au creux de nous-mêmes.
Et écrire exige l’abandon des pelures pour laisser faire la langue dans ses mélopées, ses bercements, à l’écoute des voix d’autres écrivains : « Il existait des liens secrets, des ferveurs en partage. ». Partage, mot essentiel qui  humanise « ce monde de bruit et de fureur ».

Avec la lettre muette de son nom, Catherine Leblanc a découvert que ce qui ne s’entend pas,  que ce qui s’ignore compte. « Le geste d’écrire commençait là » et se poursuit ici dans des fragments de prose brève donnant de l’espace et de l’air au lecteur, l’incitant à rejoindre Issa (mis en exergue)  : « à l’ombre des fleurs de cerisier/où /il n’est plus/ d’étrangers ». 

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